Pouy Jean-Bernard

Jean-Bernard Pouy, Ma ZAD

Révolté en tous genres ou activiste de tous poils, suis donc l’itinéraire de l’enfant de pays que décrit Jean-Bernard Pouy. Tu y trouveras un frère de combat qui donne du (son) corps à ce roman et en qui tu pourras t’identifier si tant est qu’il te séduise.

Anarchiste de toutes espèces ou manifestant anticonformiste de la première heure, pose donc ton cocktail Molotov et soulève bien haut la bannière poétique de l’auteur car le poids des mots qu’on balance parfois à la gueule des lecteurs pourrait bien survivre à un feu de poubelle ou à une vitrine cassée.

Citoyen lambda, ancré dans tes conventions et modèle du genre, ne te sens pas lésé car toi aussi, tu pourras puiser de la satisfaction dans ce récit et y trouver peut-être de quoi contenter ton esprit sage et discipliné. S’il t’arrive de rêver secrètement de révolution, tu pourras te sentir rebelle pendant quelques pages et pour autant, payer quand même l’emprunt de ton pavillon et emmener ton labrador en ballade.

N’ai pas honte de ta vie sans vague et sans reproche camarade, on a tous besoin d’une sécurité qui nous rassure et d’un toit qui nous protège. Le reste… c’est pour les autres et au final, ils sont si rares ceux qui sortent du cadre…Alors bois ta vie jusqu’à la lie, quel qu’en soit le flacon pourvu qu’il soit respectable et si la lecture te fait partir un tant soit peu vers d’autres rives, fais toi donc plaisir puisque d’autres le font.

Vois Jean-Bernard Pouy : il écrit, il vit lui. Il raconte ses histoires un peu comme si elles étaient contées au coin d’un bar par un type solitaire en mal d’amitié. Il explique vite, c’est condensé, mais ça ne l’empêche pas d’y mettre du cœur et de la densité et de faire vivre pleinement ses personnages. Il réussit même à leur donner de la profondeur même si, parfois, il en oublie quelque peu le fond de son récit à trop vouloir insister sur le manque d’amour de son héros.

Son histoire, elle est peut-être un peu bancale de temps en temps mais la poésie qu’il y met et l’humour qu’il en extirpe te feront facilement oublier les petits défauts que tu as pu repérer. T’en trouveras des auteurs qui réussissent à te balancer qu’ils ont de la cancoillotte plein le bulbe avec toute la mélancolie du monde. Ils ne sont pas si nombreux tu sais, à savoir manier le verbe et à te faire passer des messages de tristesse et de solitude à travers de l’argot et de la truculence.

Au final, tu auras passé un bon moment. Que tu sois révolutionnaire ou conformiste, tu auras peut-être apprécié les paradoxes du personnage qui fuit sa solitude autant qu’il la recherche. Et surtout, tu auras ce regard contemplatif de tout lecteur averti qui lit de la bonne prose lorsque tu te seras délecté du dernier chapitre.

Un conseil l’ami(e)… ne boude jamais ton plaisir en matière de bon roman et penses à moi quand tu liras celui-là.

 

Remerciements: Gallimard

 4ème de couv’

 

Camille Destroit, quadra, célibataire, responsable des achats du rayon frais à l’hyper de Cassel, est interpellé lors de l’évacuation du site de Zavenghem, occupé par des activistes. A sa sortie de GAV, le hangar où il stockait des objets de récup’ destinés à ses potes zadistes (ZAD = Zone à défendre), n’est plus qu’un tas de ruines fumantes. Son employeur le licencie, sa copine le quitte et il se fait tabasser par des crânes rasés. Difficile d’avoir pire karma et de ne pas se radicaliser.Heureusement, la jeune Claire est là qui, avec quelques compagnons de lutte, égaye le quotidien de Camille et lui redonne petit à petit l’envie de se révolter et de tuer tous les affreux : en l’occurrence la famille Valter, les potentats locaux et ennemis désignés des zadistes, sur qui Camille va enquêter pour trouver de quoi les neutraliser.
Long soliloque à peine interrompu par les personnages secondaires, ce roman est l’œuvre d’un Pouy au meilleur de sa forme littéraire : clins d’œil à ses maîtres, références picturales nombreuses, calembours, turlupinades et facéties…

 

 

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A vot' bon coeur m'sieurs dames...