Sheperd Peng

Peng Sheperd, Le livre de M

La nuit dernière, j’ai rêvé que le monde mourait.

Il disparaissait comme une ombre, se délitant avec la nuit. Les fragments de ce qui le rendait tangible se dissipaient doucement, les uns après les autres pour ne laisser derrière eux que des miettes qui n’avaient plus aucun sens.

Ne restaient que des bribes de chaque chose et de chaque être. Des éclats d’hommes et de femmes, des brisures de ciels, des rognures d’océans.

Qu’y a t-il de plus triste qu’un monde qui se meurt, me suis-je dit? Quel drame pire que l’Humanité qui s’efface comme si elle n’avait jamais vécue? Et pourtant…

N’est-ce pas sur une toile vierge que les plus beaux tableaux ont été peints? Et si tout oublier permettait de réinventer?

Espoir…Oublier la guerre et inventer la paix. Oublier la cruauté pour faire naître la bonté. Perdre la laideur et retrouver la beauté.

Le cauchemar devenait fantasme. J’imaginais un monde dépouillé de tout ce qui était en train de le perdre, je le rêvais harmonieux, pacifiste…

Des crocodiles géants et inoffensifs remontaient les courants, des tasses en porcelaine voletaient dans un ciel rose, des ampoules poussaient dans les champs et s’illuminaient la nuit venue…

Et puis mes chimères s’écroulait et tout recommençait.

Les crocodiles étaient exterminés pour leurs peaux, on tirait sur les tasses en porcelaine pour le plaisir et une bombe était lâchée dans le champs du voisin car trop beau ou trop illuminé ou trop convoité…

Car l’Homme est et reste Homme. D’une toile vierge, ses mains créeront la beauté ou la laideur. Il y appliquera des couleurs claires ou sombres au gré de son âme ou de son esprit. Se mélangeront chefs-d’œuvre et ébauches qui se confondront selon l’œil qui les regardera.

La nuit dernière, j’ai rêvé que le monde renaissait.

Je me suis éveillée et malgré ses faiblesses, ses imperfections et ses défauts, je l’ai trouvé beau et je me suis surprise à l’aimer.

4ème de couv’

Que seriez-vous prêt à sacrifier pour vous souvenir ?
Un jour, en Inde, un homme perd son ombre – un phénomène que la science échoue à expliquer. Il est le premier, mais bientôt on observe des milliers, des millions de cas similaires. Non contentes de perdre leur ombre, les victimes perdent peu à peu leurs souvenirs et peuvent devenir dangereuses.
En se cachant dans un hôtel abandonné au fond des bois, Max et son mari Ory ont échappé à la fin du monde tel qu’ils l’ont connu. Leur nouvelle vie semble presque normale, jusqu’au jour où l’ombre de Max disparaît…
Situé dans une Amérique tombée de son piédestal, où nul n’échappe au danger, Le Livre de M raconte l’incroyable destin de gens ordinaires victimes d’une catastrophe mondiale extraordinaire.
Peng Shepherd est américaine. Le livre de M, récompensé par le Neukom Award 2019, est son premier roman.

13 réponses »

    • Je me suis dit la même chose quand j’ai écrit et puis je me suis laissée guider par ce que m’a inspiré ce roman justement. Par mes émotions et mes sensations…tu sais comme j’aime parfois sortir des sentiers battus… 🙂

      • Faut arrêter la fumette, ma louloutte ! Rêver de crocodiles géants, de tasses en porcelaine qui volent dans un ciel rose et d’ampoules poussant dans les champs, c’est que c’était de la bonne ! 😆

        Un excellent bouquin !

      • Alice au pays des merveilles, non ??

        Cela faisait longtemps qu’on ne t’avait plus vu traîner dans les blogs, mais je viens de voir que tu avais publié une chronique (lien livraddict que j’ai accepté). Chouette, tu reviens aux affaires ?? Tu vas bien, sinon ?

      • Autant que faire ce peu… il a plu toute la semaine, juste une journée de beau temps… plein le cul de la pluie et pourtant, l’eau, c’est la vie… Juste marre de devoir mettre le nez dehors quand il pleut ou de me faire tremper 😆

        Monsieur Belette va bien et le chat aussi. Lui, il s’en fout de la pluie 🙂

    • Tout à fait Yvan.
      Son talent mijote depuis fort longtemps
      Il en ressortira un met cinq étoiles dans quelques années

A vot' bon coeur m'sieurs dames...